Tanger, lieu privilégié de passage et d’échange entre le vaste océan et la Méditerranée, considérée depuis longtemps comme l’une des portes de l’Orient, fut fréquentée bien avant la période coloniale par des artistes, peintres et écrivains.
Point stratégique depuis longtemps convoité par les puissances européennes, elle acquiert le statut de zone internationale en 1925.
De 1919 à aujourd’hui, Tanger aura été le sujet ou le cadre d’environ 80 films français, espagnols, italiens, américains et anglais.. Ainsi Aflam, diffusion des cinémas arabes fera une large part à des films occidentaux dans cette programmation. De nombreux cinéastes ont été séduits par l’atmosphère particulière et ambiguë de cette ville. Qu’ils y aient réellement tourné ou qu’ils se soient contentés de la reconstituer en studio, ils en ont fait le décor d’intrigues qui ont contribué à en construire le mythe sulfureux et les stéréotypes : Tanger plate-forme de la contrebande et du commerce de stupéfiants, « ville ouverte » propice aux trafics et aux transgressions de tous ordres, où se côtoient diplomates, militaires et marins, espions et aventuriers.
Le Tanger des Marocains, aperçu furtivement dans quelques ruelles ou boutiques de la médina, n’a jusqu’à une date récente guère intéressé les réalisateurs de ces films. Privilégiant les cabarets, les grands hôtels ou les demeures des consuls, ils ont donné la même vision de la ville arabe, désordonnée, impénétrable et bruyante.
Avec l’indépendance est né le cinéma marocain. Ce sont bien sûr les cinéastes tangérois qui ont le plus et le mieux montré leur ville : Moumen Smihi, Jillali Ferhati, Farida Benlyazid.
Aujourd’hui encore, Tanger continue d’alimenter les fantasmes des cinéastes européens, qui à la suite de Paul Bowles, William Burroughs, Jean Genet ou les Rolling Stones, viennent goûter à ses charmes et à ses tentations. Mais de nouveaux films occidentaux s’approchent plus de la ville réelle et de son histoire : celle de l’indépendance du Maroc, de la perte du statut international et de ses répercussions sur le destin des communautés étrangères qui y étaient installées.
La ville a pris depuis les années 1990 un nouveau visage : des milliers d’Africains désireux d’entrer clandestinement en Europe s’y concentrent. Une actualité dramatique qui inspire les réalisateurs.
Tanger a toujours aimé le cinéma, et le cinéma le lui rend bien. Sur la place magique du grand Socco, s’est ouverte dans les locaux de l’ancien cinéma Rif,la Cinémathèque de Tanger, tout naturellement notre partenaire pour ce cycle de projections. Ainsi cette programmation présentée aujourd’hui à Marseille se poursuivra-t- elle bientôt là-bas.
Entre rêve et réalité, bon voyage à Tanger !