Entre les années quarante et soixante, le Caire, « Hollywood sur Nil », dominait totalement le marché du cinéma arabe avec des comédies musicales où se produisaient les plus grands artistes de la scène égyptienne. Aujourd’hui encore, les films de cette époque, largement diffusés par les télévisions du Maghreb ou du Proche-Orient, continuent de fasciner le publiques : les mélodies ou les interprétations sensuelles de grandes artistes de la danse orientale bercent encore l’imaginaire amoureux de plusieurs générations de spectateurs du monde arabe. Voir ou revoir ces films et leurs interprétés prestigieux sur grand écran est un plaisir qui devient rare... « Durant les années 50 et au tout début des années 60, le cinéma égyptien a joui d’une liberté inouïe alliée à un savoir faire exemplaire. Il y a une aura particulière qui émane des films de cette époque... Je me rappelle que je n’arrivais même plus à compter les baisers échangés entre les héros tant ils étaient nombreux. » (Samir Farid, critique de cinéma, cité par C. Ayad dans « Le star-système, de la splendeur au voile » in Égypte, 100 ans de cinéma, éditions Plumes, IMA, 1995) « Certes, la plupart du temps, ces films, commerciaux par excellence, ne donnent pas une image fidèle de la réalité sociale du pays (...). Mais là n’est pas vraiment leur propos : la présence de ces parenthèses musicales, signe distinctif du cinéma égyptien, le sel de cette cinématographie, relève avant tout de la mise en scène du plaisir. Que ce soit au milieu des fastes d’un palais somptueux ou, plus simplement, dans l’embrasure d’une fenêtre ou sur un modeste balcon, dès que le chant s’élève mélancolique ou enjoue, l’émotion s’installe. Ces instants privilégiés sont aussi ceux de toutes les libertés : s’exhibe la volupté des corps des danseuses, savamment dénudées ou parées de vêtements suggestifs, et tout l’érotisme, contenu ou canalisé ailleurs, déferle sur l’écran. » (Jacques Lévy, « L’âge d’or de la comédie musicale » in Égypte, 100 ans de cinéma, éditions Plumes, IMA, 1995).